Lettre ouverte à Monseigneur Blondel

Monseigneur, vous avez donné, dans La Croix du 22 décembre 2022, une tribune intitulée : « La violence “réactionnaire” montre que le pape a eu raison d’intervenir avec son motu proprio ».

Vous justifiez votre intervention dans ce débat par votre statut d’évêque émérite depuis 2015, rappelant que, jusque-là, vous vous êtes abstenu d’intervenir dans la vie pastorale, acceptant d’être éloigné « des mentalités des nouvelles générations ». Sur ce point, vous avez bien raison. Autant vous le dire, Monseigneur, vous auriez mieux fait de rester dans votre retraite. En prêtant votre plume à vos confrères évêques, vous révélez surtout le vide total des arguments en faveur de Traditionis Custodes. Permettez-donc à un représentant de la « nouvelle génération », né avec la nouvelle liturgie, ayant choisi l’ancienne, de vous donner la réplique.

Passons sur la pauvre figure dialectique de l’amalgame entre les fidèles attachés à la tradition liturgique et les « antivax » : « Peut-être n’est-il pas surprenant que, paraît-il, bien des membres des communautés qui suivent la liturgie avant 1962 s’estiment immunisés par leur pratique de foi, ne se font pas vacciner, boudent les masques et nous traitent de timorés. ». Quand le Docteur Karine Lacombe prend la parole sur un plateau de télévision, on sait d’avance ce que dira Olivier Véran le lendemain. J’espère que quant on lit François Blondel dans La Croix, ce n’est pas l’expression des pensées de la Conférence des Evêques de France. Ces propos de café du commerce sont indignes de la gravité du débat, Monseigneur…

Essayons de discerner si vous avez des arguments plus substantiels. Hélas, on peine à en trouver. En gros, votre raisonnement consiste à dire : ces « tradis », ils ne prient pas comme nous, n’usent pas des mêmes lectures, pire, ils font du catéchisme, animent des patronages, créent des écoles. Brefs, ils ne font pas comme nous, c’est donc qu’ils ne sont pas comme nous. Puissante tautologie. On attendrait, à la suite du Pape François, des encouragements à accueillir celui qui est si différent, dans le respect de sa différence qui est une richesse pour tous. Mais non, c’est le repli frileux, le rejet, l’ostracisme. Ce qui nous a heurté dans Traditionis Custodes est ici reproduit : la globalisation, l’amalgame, et, surtout, l’absence totale de compassion et de miséricorde. Le Pape nous a donné une gifle sur la joue droite, l’évêque émérite lève à son tour la main vers notre joue gauche.

Que reste-il, finalement, de votre pauvre plaidoyer ? L’argument d’autorité : « Comment se priver du souffle impératif du concile Vatican II ? C’est bien ce qui est en débat. Or il a demandé la réforme liturgique. Il faut le dire. » Si vous voulez vous situer sur le terrain de l’autorité pastorale du Concile, libre à vous, Monseigneur. Mais il faudra aller plus loin que la simple incantation. Pour nous, « Tradis », nous nous situons sur le terrain des biens spirituels dont Traditionis Custodes veut nous priver. L’Eglise a en dépôt des trésors spirituels, qu’elle dispense notamment dans la liturgie sacramentelle. Nous lui demandons d’ouvrir les vannes pour irriguer tous ceux qui ont soifs de ces biens. Pas de fermer le robinet en leur disant qu’elle n’assurera plus désormais qu’un unique service, sans considération du bien des âmes dans leur diversité ni leurs aspirations.

A l’heure où, quel que soit le lectionnaire en usage, l’Eglise proclame dans l’évangile de Noël : « Paix sur la terre aux hommes de bonne volonté », nous vous prions, Monseigneur, d’accepter la paix que nous souhaitons pour vous. Et nous souhaitons aussi qu’on nous la laisse, pour prier pour le monde, pour le Pape et l’Eglise.

Philippe Damien

Porte-parole de l’Union Lex Orandi

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